Chères amies,
Comme vous le savez peut-être déjà, au moment où je vous écris, la marque YEBA est entrée dans un long sommeil. J’ai pris la décision d’arrêter cette aventure. Je suis enfin de l’autre côté du pont, arrivée sur une terre nouvelle, ancrée dans cette nouvelle année – nous sommes le 2 février 2025.
Il m’est désormais plus facile d’en parler, sans céder aux sirènes qui ont failli me ramener en arrière à maintes reprises.
Je veux vous emmener avec moi dans ce moment particulier : le soir du 20 novembre. Ce soir hors du temps où j’ai posté l’annonce de la fin de YEBA sur Instagram, accompagnée d’un mot dans ma newsletter.
Des adieux un soir de novembre, sous la neige
Je pensais être prête… mais je ne mesurais pas encore la portée de mon acte. Je n’avais aucune idée de l’onde de choc qu’il provoquerait.
À peine avais-je cliqué sur publier que mes réseaux sociaux se sont agités, les messages ont afflué en masse. Naïvement, je m’étais convaincue que cela passerait sans bruit ni heurt, je m’étais même persuadée : "Ce n’est qu’une marque parmi d’autres, elles comprendront."
J’ai été bouleversée par la réponse, par votre réponse.
Ce soir-là, je me tenais immobile au milieu d’un contraste étrange : le bruit des notifications qui faisaient rage sur mon téléphone, et le calme dans lequel je m’étais réfugiée. J’étais dans ma cuisine, seule au monde, regardant tomber les gros flocons de neige à travers la fenêtre. C’était presque surréel.
Jamais, après tant de joies, de victoires, de rencontres, de défis et d’échecs… jamais, en repensant à tout ce que YEBA avait apporté à ma vie, je n’aurais imaginé qu’un jour viendrait où je lui dirais au revoir. Et encore moins que cet adieu m’apporterait un sentiment de paix quasi instantané.
Personne ne l’avait vraiment vu venir. Pas même mes proches.
"Yeba, on te connaît, tu aimes cette marque comme une partie de toi-même. Tu n’auras jamais la force de t’en défaire."
Leurs messages auraient pu se mêler au flot de ceux qui me parvenaient, mais les mots leur manquaient désormais. Il était trop tard.
À mesure que la neige tombait délicatement au-dehors, une vague de tristesse et de déception arrivait à destination. En sortant de ma bulle, j’ai soudain compris : des cœurs avaient été secoués, voire brisés. Sous l’éclat de cette lucidité soudaine, un doute s’est faufilé dans ma forteresse :
Qu’avais-je fait ? Avais-je trahi toutes ces personnes qui croyaient en YEBA ? Avais-je eu raison de renoncer à ce rêve que j’avais construit et dans lequel j’avais tant cru ? Était-ce égoïste de choisir, cette fois, quelque chose de plus grand que l’ambition : moi-même ?
L ’appel intérieur, un murmure persistant.
Pourtant, cette décision n’était pas née du jour au lendemain. Je dois être honnête avec vous, depuis deux ans, une petite voix murmurait à mon oreille :
« Yeba, continuons notre route ».
C’était cette même voix, cet appel qui, il y a des années, m’avait poussé à quitter une vie de consultante confortable pour l’aventure entrepreneuriale.
Elle avait alors fendu d’un éclair le vide qui emplissait mon cœur. Sur le papier, j’avais une belle carrière, mais à cet instant précis, dans cet immense open-space, alors que mes collègues, affûtés et ambitieux, s'affairaient autour de moi, morte d’ennui, je remplissais un Excel aux mille formules. Entre deux formules, elle trouva le chemin de ma raison.
Nul doute que cette voix avait résonné en moi. Sa question, posée avec la candeur d’un enfant, m’avait prise de court et soudainement éveillée à la vie :
" Pourquoi as-tu renoncé à nos rêves ?"
Je n’avais pas de réponse à cette question. Quand le mot « rêves » s’est dessiné devant mes yeux », j’ai pris conscience que j’étais en train de passer à côté de moi-même.
Je n’étais plus la même personne. Mon tout premier ‘Shift’, une transition consciente vers une nouvelle manière d'être ou de fonctionner, qui d’après la définition que j’ai trouvée sur le internet implique souvent une évolution personnelle et/ou professionnelle profonde... Ce fut en tout cas pour moi.
Le Shift, c’est un appel de l’âme. Une invitation à retrouver le chemin qui nous attend. Ecouter cette voix intérieure m’a permis de tout quitter, une vie qui ne me correspondait plus pour emprunter la route qui m’a menée à YEBA, la marque — l’incroyable aventure à la découverte des trésors créatifs et du potentiel qui étaient enfouis en moi.
Mais j’étais loin de me douter qu’elle referait apparition.
Il y a deux ans, alors que je sentais mes forces me lâcher, elle s’est manifestée par nouvelle question:
«Tu sais que ce n’est pas pour nous ? Yeba, continuons notre route ».
Cette invitation ressemblait à un objet brillant, un renoncement impensable. Moins disponible à l’écouter qu’à l’époque, j’ai détourné les yeux. Mais sans le réaliser, elle avait semé en moi la graine d’un doute infime, qui a fini par prendre racine. Sur un terrain aride, asséché par le quotidien harassant de la marque, les déceptions, la routine et les moments d’ennui, elle s’est doucement frayé un chemin, grandissant, à mesure que la flamme pour la marque s’éteignait en moi :
Je passais plus de quatre-vingts pour cent de mon temps à faire tourner le business : régler des problèmes d’atelier, de logistique, d’administratif et répondre aux mails qui affluaient sans relâche, dansant au rythme imposé par des algorithmes de plus en plus exigeants. Pendant ce temps, la création, ces instants dédiés à imaginer et s’exprimer — tout ce pour quoi j’avais tout quitté — ce temps dont je rêvais tant, fondait comme neige au soleil.
Alors, je me suis demandé "Et si je voyais plus grand ? Une grande équipe, des investisseurs, des boutiques ? Mais j’observais bien que toutes ces personnes de l’autre côté, celles qui avaient tout cela, semblaient encore plus stressées, encore plus enchaînées à l’exigence de performance, à l’obligation de vendre à tout prix…
Nobles destins, mais si éloignés de la vision d’une vie réussie.
Mon monde rétrécissait un peu plus chaque jour. Je reconnaissais ce sentiment d’anxiété omniprésent, cette angoisse tapie au fond du ventre, cette sensation d’être prise au piège dans ma propre vie. La voie semblait sans issue.
Plutôt que de m’enfoncer davantage sur un chemin qui n’était plus le mien, je préférais revenir à l’équilibre, à l’essentiel.
Souvent, la vie fait bien les choses.
A peine en avais-je pris conscience que l’univers n’a cessé de me mettre des bâtons dans les roues, comme pour barrer la voie de la marque . Le nouveau modèle que j'avais voulu lancer, Ori — qui signifie ‘la tête, l’intelligence’ — n’a jamais vu le jour. Les campagnes ont été sans cesse décalées, et la flamme s’est éteinte au cœur d’un hiver beaucoup trop long, trop mélancolique.
Alors cet été, au mois d’aout, en plein milieu de l’Ardèche, devant une nuit étoilée, j'ai fermé les yeux et j'ai vu une autre vie possible. J'ai vu une vie paisible où j'écrivais, où j'aidais les autres à travers mes mots et mon expérience, où je les guidais. Je me suis vue calme, centrée et heureuse.
Face à d'innombrables étoiles filantes, le plus beau spectacle qui m'était donné de voir dans ma vie ce soir là, j'ai fait le vœu de retrouver ce que je chérissais le plus au monde: “ma liberté”; afin de continuer à explorer ma singularité et mes rêves.
Aussi longtemps que je me souvienne, j'ai toujours eu le sentiment d’être un ovni, une outsider, de ne trouver ma place nulle part. Et le monde de la mode, comme celui de l'entrepreneuriat, n’ont fait qu’amplifier ce sentiment. Aujourd’hui encore, je continue à chercher ma place.
Je crois que beaucoup d'entre nous connaissent ce sentiment, celui de se sentir un peu à part, une sorte d’ovni qui a atterri dans un monde un peu trop rigide, un peu trop normé, hostile à nos aspirations.
C’est une question que nous devrions tous nous poser : Qu’est-ce qui compte vraiment pour moi ? Suis-je fidèle à ce que je suis, ou suis-je en train de m’adapter à des attentes qui ne sont pas les miennes ? Combien de temps essayer d’être une autre personne ?
L’érosion d’un rêve : quand la flamme s’essoufle
Je suis donc revenue à ma vie avec la conviction que la marque devait me laisser partir.
Comment le dire à mon atelier, qui s'était tant démené pour y arriver ? Comment amener ma décision à toutes ces personnes qui croyaient en moi, m’avait accompagnée et soutenue dans cette aventure, pendant tant d’années ? Comment dire à ma Tribe, tous ces belles âmes avec lesquelles j’avais partagé mon feu sacré, l’esprit de YEBA, que j'avais décidé de renoncer. Rien que l’écrire me bouleverse encore aujourd’hui.
Croyez-moi ou pas, il faut du courage pour commencer, mais il en faut encore plus pour renoncer à ce qui a tant compté. Une chose est certaine, YEBA, la marque, était devenue trop étroite pour Yeba, la personne. J’ai tant d’histoires à raconter, tant de mots à partager qui ne tenaient plus dans un sac à main.
En préparant mes au revoirs, j’ai re-visionné le TEDx que j’avais donné à mes débuts de l’aventure en 2016 ‘(Listening to your creative voice). Dans un enthousiasme flamboyant, j’avais proclamé que j’allais créer un marque de luxe incroyable, mais… juste dans la foulée, j’avais évoqué un projet de cœur à côté de celui de la marque, celui de créer une plateforme bienveillante pour aider les femmes à réaliser leurs rêves, à construire leur confiance.
Ce que je m’apprête à faire aujourd’hui, le projet auquel je désire me consacrer désormais a toujours été en moi. Caché sous la surface, attendant le bon moment pour émerger.
En revisionnant cet instant de vie encore et encore, j’en ai soudainement pris conscience : Mon rêve était de créer, d’imaginer, d’écrire et inspirer. Et YEBA, bien qu’une magnifique aventure, n’était qu’une étape sur mon parcours, une étape pour me révéler pleinement.
Ce changement de cap n’était pas un hasard, ni un état d’âme par dépit, mais une évidence. Comme si la pièce manquante en moi venait de s’emboîter, achevant un puzzle qui révélait enfin l’ensemble du tableau, dévoilant soudainement ma vérité.
L’essentiel : l’aube d’un souffle nouveau
L’idée de l’essentiel était déjà là, depuis les prémisses. Elle m’habitait. D’abord sous la forme du podcast, puis de la Tribe et aujourd’hui de ce «cercle privé », cette plateforme bienveillante que je m’apprête à lancer. Et, cette première lettre est une invitation à toutes celles, et ceux qui auraient envie de me suivre, de me soutenir sur cette voie.
Le projet change mais ma raison d’être (mon Why) demeure : rester cette amie fidèle qui vous inspire, vous insuffle la confiance et l’envie de vous réaliser.
A travers l’essentiel (le podcast et la newsletter dans un premier temps, la boîte à outil & mes services de conseils et mentoring dans un second), j’espère vous inviter à une aventure nouvelle – où ensemble nous avançons concrètement et sereinement dans la réalisation de projets.
Mon ambition à terme est de faire de de cet endroit un espace bienveillant, un cercle privé où vous aurez l’assurance de trouver du soutien dans les moments tumultueux, comme heureux de vos aventures personnelles.
Je me réjouis de continuer cette route avec vous à mes côtés.
A bientôt
x Yeba